La maladie, quelle qu'elle soit, et surtout si elle est grave, perturbe une famille. C'est inévitable.
C'est d'abord une histoire de couple. Quand il est solide, c'est déjà très difficile. Quand il se trouve déjà "ébranlé" par quel qu'autre événement, c'est presque un challenge à relever.
M'ayant accompagné lors des premiers rendez vous chez l'hématologue, mon mari a su tout de suite ce qu'était un lymphome indolent : "wait and see". Attendre, surveiller, voir comment il évolue.
Mais pour lui, il n'évoluerait jamais. Déni, peur de revivre à nouveau avec le cancer. En 1995, son père en est décédé. Il a ravalé son chagrin, n'en a pratiquement jamais parlé. En a-t-il vraiment fait le deuil ? Je ne crois pas.
A certains rendez vous chez l'hémato, ils venaient avec moi mais, comme tout allait pour le meilleur du monde, pourquoi s'inventer un futur compliqué ?
"France Lymphome Espoir", mais pourquoi suis-je allée sur ce site ? et en plus j'en suis devenue bénévole active. Le comble du comble. Mais j'ai persévéré, personne ne pouvait m'empêcher de continuer sur ma lancée.
La vie n'a donc pas été un long fleuve tranquille pendant ces dernières années : J'ai tant de fois pris sur moi, tant de fois douté. Lui aussi sans doute.
J'ai appris ce que voulait dire le mot psy comme psychiatre, psychologue. Je me suis sentie soutenue, écoutée surtout dans la période si difficile qui a suivi le décès de mon père. Ils m'ont aidé à traverser les différentes étapes du deuil et un an après je suis à peu près sereine. Comme dans la chanson si bien chantée par Ginette Reno "J'ai besoin de parler, de parler à quelqu'un, quelqu'un qui voudrait simplement m'écouter...".
Beaucoup trop de couples, fautes de se parler, se séparent.
Désormais, il n'y a plus de place pour le déni. Il faut affronter la réalité. Il y a une bataille à mener pas l'un contre l'autre mais l'un avec l'autre.
Je n'ai pas été gâtée dans ma vie question santé. J'ai subi plusieurs opérations. Je me suis toujours relevée. J'ai besoin d'un soutien protecteur cette fois-ci. Je sais que s'il devait en être autrement, ce serait alors le commencement d'une nouvelle vie pour nous deux.
Il y a les enfants. Ils ont toujours demandé des nouvelles après chaque bilan. Je sais qu'ils n'ont pas vécu tous les trois cette maladie "invisible" de la même façon. Ils sont adultes depuis longtemps, parents (enfin tous les trois !). Je connais l'amour qu'ils ont pour moi. Ils représentent ma plus belle réussite. Ils savent ce que le mot "maman" signifie car j'ai été beaucoup présente dans leur enfance. Je les ai mis au monde, je leur devais ça. Ils n'ont pas connu les levers rapides et la course chez la nourrice comme beaucoup d'enfants. Nous avions un logement de fonction et pouvions vivre avec un seul salaire. J'ai décidé plus tard de partir "travailler". Je n'aime pas cette expression car cela signifie qu'un parent au foyer se tourne les pouces toute la journée...
Je sais que nous pourrons compter sur eux dans les moments si difficiles que nous allons traverser. Mais ils ont leur travail, leurs enfants. Il ne faut pas que leur vie change.
Que ce vilain crabe ne les atteigne jamais et encore moins leurs enfants.
Je ne parlerai pas beaucoup de mes parents qui n'ont été mis au courant de ma maladie que l'année dernière. Si j'avais pensé à ce qui allait suivre, je me serai abstenue. D'un autre côté, c'est moins difficile d'annoncer aujourd'hui le traitement à maman. Je lui ai dit en douceur, avec le sourire... mais encore très lucide, elle n'en pense pas moins. Je lui dois aussi d'être forte.
Et je terminerai par ma soeur qui se soucie de ma santé depuis le début. Nous sommes si différentes mais tellement attachées l'une à l'autre. Nous avons perdu notre papa (c'était notre Dieu à nous, même si lui ne croyait nullement au soi-disant tout puissant !). Nous avons vécu différemment notre deuil. Moi ayant besoin d'en parler, elle ne pouvant pas en parler. Nos deux couples sont en parfait accord afin qu'il y en ait toujours un de présent tant que maman vivra. Et nos enfants sont très complices, toujours heureux de se retrouver.
Je sais que ma soeur sera toujours là dans les moments difficiles.