mardi 27 septembre 2016

La famille

La maladie, quelle qu'elle soit, et surtout si elle est grave, perturbe une famille. C'est inévitable. 

C'est d'abord une histoire de couple. Quand il est solide, c'est déjà très difficile. Quand il se trouve déjà "ébranlé" par quel qu'autre événement, c'est presque un challenge à relever.

M'ayant accompagné lors des premiers rendez vous chez l'hématologue, mon mari a su tout de suite ce qu'était un lymphome indolent : "wait and see". Attendre, surveiller, voir comment il évolue.
Mais pour lui, il n'évoluerait jamais. Déni, peur de revivre à nouveau avec le cancer. En 1995, son père en est décédé. Il a ravalé son chagrin, n'en a pratiquement jamais parlé. En a-t-il vraiment fait le deuil ? Je ne crois pas.
 A certains rendez vous chez l'hémato, ils venaient avec moi mais, comme tout allait pour le meilleur du monde, pourquoi s'inventer un futur compliqué ?
"France Lymphome Espoir", mais pourquoi suis-je allée sur ce site ? et en plus j'en suis devenue bénévole active. Le comble du comble. Mais j'ai persévéré, personne ne pouvait m'empêcher de continuer sur ma lancée.

La vie n'a donc pas été un long fleuve tranquille pendant ces dernières années : J'ai tant de fois pris sur moi, tant de fois douté. Lui aussi sans doute.
J'ai appris ce que voulait dire le mot psy comme psychiatre, psychologue. Je me suis sentie soutenue, écoutée surtout dans la période si difficile qui a suivi le décès de mon père. Ils m'ont aidé à traverser les différentes étapes du deuil et un an après je suis à peu près sereine. Comme dans la chanson si bien chantée par Ginette Reno "J'ai besoin de parler, de parler à quelqu'un, quelqu'un qui voudrait simplement m'écouter...". 
Beaucoup trop de couples, fautes de se parler, se séparent. 

Désormais, il n'y a plus de place pour le déni. Il faut affronter la réalité. Il y a une bataille à mener pas l'un contre l'autre mais l'un avec l'autre. 
Je n'ai pas été gâtée dans ma vie question santé. J'ai subi plusieurs opérations. Je me suis toujours relevée. J'ai besoin d'un soutien protecteur cette fois-ci. Je sais que s'il devait en être autrement, ce serait alors le commencement d'une nouvelle vie pour nous deux.

Il y a les enfants. Ils ont toujours demandé des nouvelles après chaque bilan. Je sais qu'ils n'ont pas vécu tous les trois cette maladie "invisible" de la même façon. Ils sont adultes depuis longtemps, parents (enfin tous les trois !). Je connais l'amour qu'ils ont pour moi. Ils représentent ma plus belle réussite. Ils savent ce que le mot "maman" signifie car j'ai été beaucoup présente dans leur enfance. Je les ai mis au monde, je leur devais ça. Ils n'ont pas connu les levers rapides et la course chez la nourrice comme beaucoup d'enfants. Nous avions un logement de fonction et pouvions vivre avec un seul salaire. J'ai décidé plus tard de partir "travailler". Je n'aime pas cette expression car cela signifie qu'un parent au foyer se tourne les pouces toute la journée...
Je sais que nous pourrons compter sur eux dans les moments si difficiles que nous allons traverser. Mais ils ont leur travail, leurs enfants. Il ne faut pas que leur vie change. 
Que ce vilain crabe ne les atteigne jamais et encore moins leurs enfants. 

Je ne parlerai pas beaucoup de mes parents qui n'ont été mis au courant de ma maladie que l'année dernière. Si j'avais pensé à ce qui allait suivre, je me serai abstenue. D'un autre côté, c'est moins difficile d'annoncer aujourd'hui le traitement à maman. Je lui ai dit en douceur, avec le sourire... mais encore très lucide, elle n'en pense pas moins. Je lui dois aussi d'être forte.

Et je terminerai par ma soeur qui se soucie de ma santé depuis le début. Nous sommes si différentes mais tellement attachées l'une à l'autre. Nous avons perdu notre papa (c'était notre Dieu à nous, même si lui ne croyait nullement au soi-disant tout puissant !). Nous avons vécu différemment notre deuil. Moi ayant besoin d'en parler, elle ne pouvant pas en parler. Nos deux couples sont en parfait accord afin qu'il y en ait toujours un de présent tant que maman vivra. Et nos enfants sont très complices, toujours heureux de se retrouver.
Je sais que ma soeur sera toujours là dans les moments difficiles.















dimanche 25 septembre 2016

La vie en abstention thérapeutique

Comment expliquer qu'on a "un cancer" et qu'on n'est pas soigné ? Telle est la question ?

A l'annonce de la maladie, étant très "ouverte", je l'ai dit à tout le monde... 
Certains avaient compris et me demandaient régulièrement d'où j'en étais avec le suivi de mon problème.

D'autres avaient oublié et ne m'en parlaient plus jamais... c'est une affaire classée ou bien elle nous a raconté des bêtises. Ben oui, on peut s'inventer une maladie, n'est ce pas ?

Mais comment peut-on oublier ce genre de nouvelles ? 

Comment réagirai-je si on m'annonçait cela ? Je ne me pose même pas la question tellement je sais que je ne jugerai pas sans savoir. Il y a tellement d'outils d'information désormais qui peuvent nous aider à comprendre.  

Mais malheureusement il y a des gens dont l'intelligence laisse à penser qu'elle n'est pas très développée... on n'y peut rien.

Il y a aussi des personnes qui se sont plus apitoyées sur mon entourage proche que sur moi-même. "Une plaie cette bonne femme qui ne parle que de sa santé !".
Après maintes réflexions, je ne leur en veux même pas. Il faut pardonner aux faibles d'esprit.

Toujours est-il que ces années n'ont pas été faciles. On vit avec une épée de Damoclès au-dessus de la tête. Les projets, on les fait à court terme. Une survie. Pourtant,  j'ai vécu normalement en participant à toutes sortes d'activités. Et quand la fatigue se faisait sentir, je n'ai jamais su vraiment si le lymphome y était pour quelque chose. Ayant posé cette question à mon hématologue, sa réponse fut un NON catégorique.

Et puis, on espère que la maladie restera en sommeil pour l'éternité. Mais.... on n'y croit pas.

Aujourd'hui, à la veille du traitement, je tiens à remercier tous les membres de "France Lymphome Espoir" qui m'ont aidé à avancer pendant ces années. Certains sont devenus de vrais amis. Sans cette association, je pense que je n'aurais pas tenu le coup : trop seule, un poids trop lourd à porter. 

Merci à toi Guy qui l'as créée quand la maladie a frappé à ta porte ainsi qu'à tes co-fondateurs et à tous ceux qui ensuite l'ont fait vivre.




samedi 24 septembre 2016

La découverte

2008 : Après un déménagement, je change de médecin. Et, compte tenu de mes douleurs chroniques, le Docteur Christine D. généraliste, demande l'électrophorèse des protides. Un pic gamma est découvert avec une protéine monoclonale de type Agm à spécificité kappa. Je regarde la signification sur Internet et là l'angoisse : "cancer, leucémie.... bon courage". Je suis presque déjà morte...
S'en suit une visite chez une hématologue qui fait d'autres examens dont un myélogramme et me rassure. Un suivi va être mis en place car je suis peut-être porteuse d'un lymphome (cancer des ganglions lymphatiques).

2010 : Une échographie abdominale est demandée par le Docteur D. compte tenu de deux ou trois infections urinaires. Et là, découverte de ganglions dans l'abdomen. J'ai compris ce qui m'arrivait.
Un rendez-vous est vite pris avec l'hématologue et une autre batterie d'examens est effectuée : scanner, prélèvement de ganglions, biopsie ostéo médullaire, tep scan... et là le verdict tombe : lymphome folliculaire indolent de faible grade de malignité (grade 1 - stade 4).
Ce genre de lymphome ne se traite pas systématiquement. On le surveille simplement. Et après trois ans, la surveillance devient moins rapprochée.

2016 : L'hématologue a pris sa retraite. Elle est remplacée. Je suis désormais suivie par le Docteur D. une jeune femme fort aimable. A l'échographie de juin, les ganglions ont un peu augmenté de volume mais la biologie est parfaite. Un tep scan doit être réalisé. Il se fera le 26 août.
Contrairement à celui que j'avais passé début 2011, on ne me donne pas les résultats. Donc j'attends.
Connaissant très bien la secrétaire de l'hémato (Jeanne C.), une dizaine de jours après, je l'appelle. Nous nous tutoyons. J'ai été aussi quelques années secrétaire assistante de spécialistes. Elle me dit "Le Docteur D. m'a demandé de te remettre un rendez-vous". Ok, j'ai compris. Mais ce rendez-vous, faute de place, n'est que 3 semaines plus tard...
Mon dossier doit passer en commission pluri-disciplinaire pour parler de mon cas.
 Quelques jours plus tard, n'y tenant plus, je rappelle Jeanne C. Très sympa, elle me trouve un rendez-vous trois jours plus tard.
Faisant partie de l'association "France Lymphome Espoir", je connais le traitement standard qui a fait ses preuves. Mais il y a aussi un essai clinique qui m'intéresse.
Mon mari m'accompagne.
Impossible pour moi de tergiverser avec le fameux essai clinique (qui en fait est suspendu). J'aurais droit au Rchop : 6 cures + deux ans d'anticorps monoclonaux à raison d'une injection tous les deux mois.
Le Docteur D. nous explique tout : les effets secondaires, etc. mais je connais déjà tout cela. 
En attendant, il faut refaire une biologie, une biopsie ostéo-médullaire, une échographie cardiaque, voir un chirurgien pour la pose d'une chambre implantable, un anesthésiste.

Je plaide ma cause pour assister le 8 octobre au 10 ans de l'association "France Lymphome Espoir" à Lyon.
La première cure n'aura donc lieu que le 11 octobre (sur deux jours) la première journée  le R (mabthera) doit être perfusé tout doucement  afin de voir comment je réagis (risque allergique +++). Si tout se passe bien me seront administrés le lendemain les produits chimiothérapiques.
Ma fille qui est coiffeuse est venue me couper les cheveux mardi dernier et faire ma dernière couleur. Mardi prochain, nous irons ensemble choisir une perruque. La chute de cheveux est le premier effet secondaire cité !!! 

Avec 25 mg de seresta et 10 mg de miansérine (athymil), mes nuits sont toujours peuplées de cauchemars mais je dors. Par contre, les réveils sont rudes, la réalité me revenant en pleine figure avec toutes mes interrogations.

Aujourd'hui, j'ai eu le courage d'annoncer le traitement à ma maman. Difficile pour elle qui s'apprête à avoir 90 ans. Et ce ne sera pas jour de fête pour elle ni pour nous. Juste un an après le décès tragique d'un être précieux : mon père. Son départ a été un grand choc pour nous tous.
Ce choc aurait-t-il contribué à faire flamber ce lymphome qui était en sommeil depuis plusieurs années ? Et ma maladresse d'avoir dit à mes parents en juillet 2015 que j'étais porteuse de cette maladie grave aurait-elle plongé mon cher papa, tellement fort et devenu si vulnérable, dans une profonde dépression que nous n'avons pas vue et qui l'a conduit à mettre fin à ses jours ?
Mais je sais combien il est inutile de chercher des réponses à ces deux questions.